Y’en a assez

Quatre pages proposés par les collectifs d’Alençon, Bordeaux CUB, CUM (communauté urbaine de Montluçon), , les collectifs de Nantes (Nantes et CUN), Limoges, Paris Air Libre, Paris 10-11-12 et Trappes.
mercredi 2 novembre 2005

Y’en a assez

Revenons 20 ans en arrière.
Le chômage et le prix de l’essence montaient.
Le Medef de l’époque, pour sauver l’Unedic du déficit,
réduisait les allocations. Le gouvernement créait l’ASS
pour les chômeurs de trop longue durée que l’Unedic
ne voulait plus. Tout ce beau monde prônait le dynamisme
économique pour nous sortir de la crise. Depuis
la crise est devenue un état permanent hormis quelques
périodes où pendant 2 à3 ans le boom de l’économie
faisait couler un flot d’argent sur une petite part de la
population.
On a vu la misère s’étendre toujours, s’installer aux coins
de nos rues, le manque d’emploi désertifier des régions.
Sous cette pression le travail s’est durci, on en demande
plus mais les salaires stagnent. Ces dernières années est
arrivé le nouveau pauvre, fruit de ces graines plantées à
l’époque. Aujourd’hui l’essence est à10 francs, les chômeurs sont des millions et le Medef agite devant les partenaires sociaux un déficit qu’il a créé pour terroriser
tout le monde.
Les négociations qui s’ouvrent cette semaine vont être
cruciales.
Le 8 novembre : le Medef, pour réduire le déficit, va
proposer des réductions de la durée ou du montant des
allocations.
Le 9 novembre : Borloo va présenter un projet de loi sur
les minimas sociaux. Ce projet de loi sera calqué sur
celui qui concerne le contrôle des chômeurs.
Automatiquement une partie de ceux qui sont exclus
du système d’assurance chômage tombe dans les minima
et le gouvernement, comme les conseils généraux,
n’ont qu’une idée en tête : réduire toutes les formes de
revenus et nous contraindre àaccepter des emplois
non-choisis et sous payés.
Si nous avions un gouvernement respectueux de la
constitution et notamment des articles 5 et 11 du préambule
de 1946, il prendrait les mesures pour faire cesser
cette spirale qui nous enfonce dans la misère.
Mais les droits inscrits dans les textes deviennent
chaque un jour un peu plus une fiction pour tous ceux
qui subissent la spirale de la paupérisation : nous sommes
des millions et plus nombreux chaque jour àfaire
partie de cette nouvelle classe laborieuse : ni chômeurs,
ni travailleurs, nous alternons des périodes d’emploi
non choisi sous le régime de contrats de plus en plus
précaires, et des périodes de chômage tout aussi imposées,
avec de moins en moins de revenu.
Alors que nous sommes devenus collectivement les
boucs émissaires (désignés par les vrais responsables de
la situation), alors que l’espace médiatique est voué tout
entier àla dénonciation des travailleurs (qui veulent
trop de droits) et des chômeurs (qui ne veulent pas travailler), au bout de tant d’années de politiques infructueuses menées sur le dos des premiers concernés, il est urgent de reprendre l’offensive et de débattre, dans la
lutte, des moyens de nous organiser ensemble, chômeurs,
précaires, intermittents, salariés, pour d’autres
mondes possibles.
A tous ceux que cette perspective intéresse,
nous proposons une campagne d’actions et de
débats , qui commencera par des initiatives coordonnées
àpartir du 7 novembre.

L e p l e i n e m p l o i p r é c a i r e ?

Unédic et gouvernement :
vers leplein-emploi précaire ?

Voici vingt ans que, pour restructurer la protection
sociale du chômage et de la précarité, on joue cyniquement
des variantes de la " crise de l’Unédic ". La
dernière fois, c’était lors de l’adoption du protocole
du 26 juin 2003. Prévue àl’automne 2005, la " renégociation
" de la convention du régime d’assurancechômage
(RAC) s’annonce mal. Comme àl’accoutumée,
la crise a pour nom déficit : on en annonce
un de 15 milliards, alors que la majorité des demandeurs
d’emploi n’ouvrent pas de droit àune allocation.

De l’utilité du déficit

C’est le schéma désormais classique d’une crise des
ciseaux, théâtralisée àdes fins politiques : àmesure
que le chômage de masse et la précarisation de
l’emploi étendent leur emprise, les ressources de
l’Unédic diminuent, pendant qu’augmente le nombre
de demandeurs d’allocation et la quantité
d’ayants droit potentiels. Moins de cotisations et plus
de demandeurs ? Cette institution est rigoureusement
dépendante d’un mécanisme de financement
gagé sur le seul volume horaire d’emploi. Dès lors
que la visée du "plein-emploi " a pour tout horizon le
plein-emploi précaire, ni une nécessaire mise àjour
des mécanismes de cotisations (modulations, déplafonnement),
ni même l’arrêt des exonérations de
charges, d’ailleurs nullement envisagés par l’État et
le Medef, ne sauraient suffire àassurer les moyens
d’une continuité de droits dans un salariat flexible
qui fait de chaque personne l’entrepreneur d’ellemême.
On vante les garanties offertes par le " modèle
danois " de flexsécurité, aux modalités d’ailleurs
discutables, en oubliant le plus souvent de dire que
celui-ci repose sur un taux et des modes de prélèvement
qui nécessiteraient ici l’instauration d’une profonde
réforme fiscale, réforme qu’aucune fraction
de la classe politique hexagonale n’imagine initier.
On oublie également que le syndicat a dans nos
contrées pour priorité la défense de l’emploi (le
"droit au travail ") qui néglige celle du droit du travail
et tend àignorer les droits qui ne dépendent pas de
l’entreprise, comme ceux concédés lors des périodes
de chômage.
Le déficit est une arme politique destinée àêtre
remise en jeu chaque fois que nécessaire, arme défensive d’une institution opaque,l’Unédic, qui dispose
des contributions des salariés comme de ses propres
deniers et refuse de rendre des comptes sur son fonctionnement, arme d’une attaque massive et répétée contre les droits sociaux. Il s’agit en fait de préserver
le déficit pour être en mesure d’annoncer chroniquement un " sauvetage du régime" qui doit légitimer des mesures prises au détriment des salariés.

État / patronat / syndicat :
un tripartisme inavoué

L’Unédic a été créée en 1958, non par
des " partenaires sociaux ", mais par l’État.
Il s’agit alors d’organiser un régime de
protection des salariés face au chômage
conjoncturel et d’impliquer, par la création
de ce régime qui les institue comme
tels, ces " partenaires " dans la gestion du
système. Mais la nature du chômage se
modifie avec la généralisation du fordisme : dès 1967, le chômage de mobilité se développe. Face àdes emplois interchangeables, les salariés utilisent la mobilité
pour aller vers des conditions de travail moins mauvaises, des salaires supérieurs.
Le déclenchement de la crise, au lendemain
de 1968, vise clairement àreprendre le contrôle de cette mobilité ouvrière par la précarisation. S’enclenche alors un
long cycle de restructurations industrielles (1974/1986) durant lequel la fonction du régime d’assurance-chômage connaît des modifications déterminantes. L’arrivée
au pouvoir de la gauche verra en 1982 intervenir la première réforme d’ampleur de l’Unédic : des filières d’indemnisation sont instaurées, qui font varier la durée
d’indemnisation selon la durée d’affiliation.
Le nombre de chômeurs nonindemnisés explose. Se met en place une logique de segmentation des droits,
mesurés par la durée d’emploi, qui se prolonge
jusqu’àaujourd’hui. Manifestation
culminante de cette logique de segmentation,
la " refondation sociale " patronale
prônée par le Medef, donnera naissance,
dès 2000, àl’actuel cadre général régissant
le RAC (Régime d’Assurance
Chômage), la première mouture de la
convention Unédic dite du PARE (le " programme d’ aide au retour àl’emploi"). La segmentation des populations
cherche désormais àatteindre l’individu,
désigné comme responsable de son chômage
et stigmatisé comme tel. On revendique
un " suivi individualisé ", on crée le
dispositif du " programme d’action personnalisé
" (PAP), destiné àactiver le chômeur,
qu’il soit indemnisé ou non, et àle
diriger, y compris sous la contrainte d’une
radiation, vers les emplois disponibles
(d’où l’inflation chronique du discours sur
les postes non pourvus et les gisements
d’emploi). La longue montée en charge
du PAP implique la mobilisation de
bataillons d’agents de dynamisation et de
contrôle et la création de nouvelles formes
d’embauche précaire (contrat d’avenir,
RMA, chèque emploi, contrat " nouvelle
embauche " révocable àtout
moment). Le paritarisme qui lie organisations
patronales et confédérations syndicales
dans une relation de négociation
n’est qu’une fiction nécessaire. De fait, la
mise en application de chaque convention
Unédic dépend d’un agrément gouvernemental.
Les dégâts directs occasionnés
par les carences béantes du RAC
(taux, niveau et durée de couverture) doivent
être partiellement pris en charge par
l’État (ASS, RMI, AFT, etc.), lorsque celui-ci
ne se fait pas tout bonnement le relais de
" solutions " expérimentées àl’Unédic
pour les généraliser. Toute mesure qui
modifie le code du travail est susceptible
de produire des effets en retour sur le
RAC. Il en est ainsi, par exemple, de l’instauration
du RMA (revenu minimum d’activité).
Le RMA relève certes en droite
ligne de la préconisation d’une " activation
des dépenses passives " ânonnée par
l’OCDE depuis vingt ans, mais il découle
plus concrètement des " conventions de
conversion ", instaurées àl’Unédic, et
donc déjàreconnues par l’État, et qui permettent
de verser directement l’allocation
d’un chômeur àl’employeur.
Ainsi, les " négociations " Unédic jouentelles
en retour sur le code du travail, tout
comme les initiatives gouvernementales
en matière d’emploi, de code du travail
ou d’insertion agissent sur l’Unédic.
Derrière la fiction d’un paritarisme patronat
/ syndicat, des contaminations croisées
entre dispositifs interviennent, un tripartisme
de fait État / patronat / syndicat
se manifeste.
L’emploi,
mot d’ordre du contrôle social
Destinées àpromettre une sécurité non
exclusivement policière, les gesticulations
du "plan d’urgence pour l’emploi" de
Villepin auront des conséquences. Elles
accentuent la stigmatisation des chômeurs,
attaquent frontalement la garantie
de durée attachée au CDD (donc du
salaire et de l’allocation qui éventuellement
lui succède) avec un "contrat nouvelle
embauche " qui va d’emblée concerner
un tiers des salariés et a vocation à
être généralisé.
Dans le même temps, au chapitre de ce
tripartisme qui lie de fait État, patronat et
confédérations syndicales dans l’organisation
de la mise au travail et du contrôle
de la main-d’oeuvre, une nouvelle
" convention tripartite État / ANPE /
Unédic " qui doit être adoptée dans les
mois qui viennent va donner pour la première
fois des pouvoirs de contrôle et de
radiation des chômeurs aux Assédic, c’està-
dire àdes organismes privés qui seront
simultanément juges et parties, et devant
lesquels nous serons présumés coupables.
Cette convention vient s’ajouter àun
ensemble de dispositions qui visent à
imposer des emplois précaires sous-payés
et àradier tout récalcitrant. On compte
bien sà»r faire baisser le nombre des chômeurs
mais on prévoit en outre une diminution
de la proportion de chômeurs
indemnisés ! On instaure également une
dégressivité punitive graduée des allocations
chômage : premier emploi refusé,
allocation amputée de 10%, deuxième
refus, moins 20%, troisième, moins 30%,
quatrième, radiation de la liste et suspension
d’allocation.

La sale gueule du contrôle

Après le Rma , un nouvelle menace se
profile pour les allocataires du RMi : un
réforme législative est annoncée : elle a
été précédée par deux rapports l’un
pour le Sénat, l’autre rédigé par Martin
Hirsch président d’Emmaüs France.
Une proposition est commune àces
deux rapports : il faudrait refondre les
minima sociaux et donc faire disparaître
le Rmi en tant que tel pour repenser
totalement les formes du revenu minimum.
Les projets du gouvernement
vont beaucoup plus loin en proposant
de légaliser la possibilité de sanctions
financières en cas de refus d’actions
d’insertion. C’est une remise en cause
de ce qui était le mode de fonctionnement
du Revenu Minimum d’insertion :
l’établissement d’un contrat d’insertion
entre l’allocataire et le référent RMI
censé incarner l’Etat puis le conseil
général. Ce mode de fonctionnement,
au moins sur le papier, indiquait une
prise en compte possible des désirs de
l’allocataire et le droit pour celui-ci de
les négocier avec le travailleur social.
Le terme " refus d’actions d’insertion"
détruit ce droit, puisque c’est clairement
pour l’une des deux parties
contractantes, l’institution, la possibilité
d’imposer des actions sans l’accord de
l’autre contractant.
Cette réforme, calquée sur le décret du
contrôle des chômeurs, aura évidemment
un objectif économique de restrictions
d’accès au RMI : elle satisfera,
en légalisant la possibilité de massifier
les radiations, l’ensemble des présidents
de Conseils généraux. De l’avis
unanime de tous, le RMI est devenu un
mode d’indemnisation normal du chômage.
Il est donc logique qu’il subisse
les mêmes attaques que le régime
indemnisé. D’ailleurs, il fonctionne
aussi, comme l’indemnisation chômage,
comme un moyen de faire baisser
le coà»t du travail pour les patrons : de
la même manière qu’un chômeur sur
trois cumule allocation et salaire,
700.000 Rmistes cumulent le RMI et un
salaire sans parvenir àun niveau de
revenu satisfaisant.
Mais l’objectif purement comptable se
double ici de bien autre chose :
contrairement àce qui se passe pour
les allocations chômages, le RMI, n’a
jamais été conçu comme une contrepartie
àla perte d’un emploi conditionné
àla preuve qu’on est bien toujours
en train d’en chercher un nouveau. Ce
qui caractérise les règles d’attribution
du RMI, ce n’est pas la qualité de la personne,
demandeuse d’emploi, invalide,
parent isolée, mais un seuil de revenus
en deçàduquel on peut percevoir tout
ou partie du minima.
Et la contrepartie posée par le législateur
n’est pas la recherche d’un emploi,
mais l’insertion, déclinée sous différentes
formes : insertion professionnelle,
formation, création d’entreprise, accès
àla santé ou au logement.
Évidemment dans l’esprit du législateur
de l’époque, comme dans celui
des responsables de l’attribution du
RMI depuis sa création (préfets puis
présidents des Conseils Généraux),
cette notion d’insertion est synonyme
de contrôle social : contrôle matérialisé
par la contrainte au retour àl’emploi
déclinée sous toutes ses formes mais
aussi par tout un système de contraintes
sociales imposées ou acceptées par
l’allocataire (suivi psychiatrique, convocations
plus ou moins fréquentes,
démarches administratives).
Reste qu’en 2002, soixante pour cent
des contrats d’insertion signés n’avaient
pas comme objectif principal
l’insertion professionnelle.
C’est cet état de fait que le gouvernement,
précédé par les initiatives de
nombreux conseils généraux veut
aujourd’hui détruire.
Pourquoi ?
Pour répondre àcette question, il faut
comprendre ce qu’a signifié au fil des
années le RMI pour les concernés : une
allocation de misère, bien sà»re, synonyme
de stigmatisation sociale, aggravée
par l’étiquette d’assistés portée
aussi bien par les discours de droite
comme par ceux de l’immense majorité
de la gauche, sur les deux modes
culpabilisateur ou compassionnel. Le
coà»t de la mesure n’était pas grand
chose comparée àsa valeur ajoutée, la
création d’un épouvantail et d’un contre-
modèle àagiter devant les travailleurs
susceptibles de se rebeller
contre leurs conditions de travail, ou
les chômeurs indemnisés rétifs àla
reprise d’un emploi non choisi.
Vu sous cet angle unique, le RMI n’est évidemment pas une mesure àdéfendre
, ni un acquis àconserver.
Mais le RMI fut et est bien autre chose :
il est la possibilité d’un choix, celui du
refus temporaire ou définitif de l’emploi
salarié, et le corollaire de ce choix,
l’utilisation d’une partie de son temps
de vie àautre chose.
Et c’est autre chose, c’est une infinité
de possibles expérimentés par une
multitude d’entre nous au fil des
années : la période de repos après une
mauvaise expérience d’emploi, ou
entre les études ou le premier emploi,
le temps pris pour s’occuper d’un
gamin ou de parents âgés, le temps de
voyager, de faire une formation, de
créer une entreprise. Pour beaucoup,
c’est aussi un choix, vécu comme définitif
et sans appel, de refus de l’emploi
souvent accompagné d’une démarche
de subversion sociale sous toutes ses
formes.
Si une partie de ces choix apporte aussi
une valeur ajoutée au capital en terme
d’utilité sociale, ce qui au passage est
une réfutation de l’identité d’assisté,
comme la création d’entreprises, une
partie de la production dite "culturelle",
ou le bénévolat au service des entreprises
de l’humanitaire, l’autre partie de
ces choix est une ré-appropriation du
temps et son utilisation pour une
forme d’utilité sociale qui ne sont pas
celle du système actuel.
L’investissement dans les permanences
de lutte, dans les luttes tout court, dans
des expériences de vie collective avec
ré-appropriation de l’espace, dans la
production d’analyses sociales, dans
une partie de la production culturelle
sont toute cette richesse que nous
défendrons contre la suppression de la
forme actuelle du RMI.
C’est aussi la possibilité même de pouvoir
continuer àrevendiquer cet autre
usage du temps : nous sommes finalement
beaucoup àassumer cette identité
de Rmiste non pas heureux, mais au
moins volontaires et àcréer par notre
existence même une remise en cause
du discours dominant, selon lequel il
n’y a pas d’avenir possible en dehors
du plein emploi, précaire ou non.
C’est cet acquis d’un revenu minimum
de résistance qui est attaqué àtravers
les projets de loi àvenir : tout le monde
sait que les patrons n’ont pas besoin de
l’ensemble des Rmistes, par contre ils
ont besoin que l’entièreté du réservoir
àmain d’oeuvre reste sous pression. Ce
qui est en jeu , c’est la disparition de
tout temps libre : il s’agira de nous balader
de bilans de compétence, en
stages de re-motivation, de consultations
psy en formation "caissière de
supermarché", afin que la vie d’un
Rmiste ressemble de toute façon àcelle
d’un salarié avec ses horaires de travail,
le salaire en moins. D’ailleurs, àtravers
ces projets de loi, l’objectif est bien
aussi de massifier une nouvelle forme
de salariat, où de plus en plus d’entre
nous connaîtront des périodes plus ou
moins courtes d’emploi subventionné
sous toutes ses formes (cumul minima -
salaires , contrats précaires du RMA au
contrat d’avenir ...), alternées avec des
périodes de chômage avec activités
occupationnelles contraintes.
Voilàpourquoi nous défendrons le
RMI.
Voilàpourquoi, dans cette bataille qui
va s’engager, nous lutterons pour son
augmentation, pour son extension au
moins de vingt-cinq ans, aux
étudiants , àl’ensemble des étrangers
et pour son individualisation.
La lutte ne finira d’ailleurs pas avec le
vote de la loi, qu’il sera difficile d’empêcher.
Le savoir accumulé pendant toutes
ces années par des précaires organisés
sur les moyens de détourner l’insertion
de son but initial, mais aussi
toutes les initiatives collectives qui ont
fleuri localement ces derniers mois
contre des projets locaux de convocations
massives ou de retour àl’emploi
forcé nous donnent des pistes qu’il est
urgent de creuser.

R e m o b i l i s e - t o i !

Depuis fin septembre, l’ANPE et l’AFPA
("Plus forts pour l’emploi") de Saint-
Herblain (près de Nantes) convoquent
3500 chômeurs de longue durée.
Présence obligatoire, sous peine de sanction ! C’est une conséquence directe du décret du 2 aoà»t sur le contrôle des chômeurs,tel que cela est rappelé dans le
courrier expédié.
Les chômeurs se retrouvent donc par
groupes de 120 dans un amphi de
l’AFPA pour se voir proposer, àgrands
coups de propagande sur "renouer avec
le monde l’entreprise" (sic), trois "actions
rémunérées" (voir la lettre àla fin de cet
article).
A la clé : trois formations (Remobilisation,
Découverte de Métiers, Consolidation de
Projet) au contenu pour le moins énigmatique
destinées àdégonfler les chiffres
officiels du chômage (les stagiaires de
la formation professionnelle ne sont plus
considérés comme demandeurs d’emploi).
Qui plus est, on peut légitimement
soupçonner ces " formations " assorties
de stages d’être des sortes d’EMT
(Evaluation en Milieu de Travail : tu bosses
gratos pour des entreprises), qui permettrons
àl’ANPE d’obliger les chômeurs
àaccepter des "offres d’emploi" dans le
"métier découvert" : industrie, bâtiment
et "service àla personne".
Les militants d’AC ! de Nantes, convoqués
comme beaucoup, sont présents
depuis plusieurs jours àces "informations
collectives"... dans l’arène mais également
tous les matins et tous les aprèsmidi
àl’entrée de l’organisme de formation
pour avertir les demandeurs d’emploi
des risques encourus et des conséquences
éventuelles de tout refus de leur
part. Nous n’avons d’ailleurs pas besoin
d’insister beaucoup : les chômeurs
convoqués sont souvent mécontents,
plus que curieux, et semblent déjàtrès
au fait des entourloupes de l’ANPE.
L’AFPA n’est pas en reste ; si nous sommes
avertis des risques d’une absence de
réponse àces convocations, lors de ces
réunions les "formateurs" de l’AFPA n’avertissent
absolument pas des risques
qu’il y a àrefuser de s’inscrire dans une
de ces trois "actions" ! Nous savons pourtant
que tout refus de "prestation" de
l’ANPE non "justifié" par un " motif légitime
" entraîne une sanction... " Motif légitime
" qui semble rester àla seule et
entière appréciation de chaque agence
et de chaque agent ANPE.
Après avoir tenté d’informer pendant
plusieurs jours les chômeurs, AC ! Nantes
reste vigilant et reprendra prochainement
contact avec eux pour évaluer
ensemble les conséquences de ces
convocations et "actions" AFPA.

Ce que l’AFPA ne vous dira pas et que vous devez savoir

Dans votre convocation AFPA / ANPE, il est fait mention du plan de Cohésion Sociale
de Borloo et du décret du 2 aoà»t de Villepin. Ces nouveaux dispositifs peuvent être
lourds de conséquences sur votre situation sociale.
Lorsque vous vous présenterez àl’AFPA, il vous sera demandé de remplir une fiche
" Programme DELD 2OO5 " (comprenez Demandeur d’Emploi de Longue Durée). Sachez
que toutes les informations que vous allez donner vous concernant seront utilisées
pour vous obliger àsuivre une formation ou àoccuper un emploi qui ne sera pas forcément
conforme àvos souhaits actuels.
Réfléchissez donc bien avant de mentionner telle formation ou telle expérience professionnelle
dans un secteur d’activité qui ne vous correspond plus. De même, si vous
indiquez que vous possédez un véhicule, sachez que cela signifie que vous êtes mobile
et qu’on peut donc vous proposer des activités loin, voire très loin, de votre domicile.
On vous demandera également d’opter pour une " Action ". Si vous n’en choisissez
aucune, il est TRÈS IMPORTANT de vous justifier sérieusement. Sachez qu’un refus pur
et simple " d’action " ou de " prestation " ANPE peut justifier une sanction. Les seules
exceptions sont des " motifs légitimes "... qui ne sont définis nulle part !
Vous pouvez demander (publiquement, de préférence, afin que tout le monde le
sache) quel est le contenu de ces " actions ", àquoi elles vous engagent et ce qui se
passe si vous n’en choisissez pas une dès la fin de cette réunion. Demandez confirmation
àl’agent ANPE s’il est présent. Indiquez très clairement sur votre fiche ce qu’il
vous aura dit (faites-lui signer au besoin). Indiquez, par exemple, que vous ne pouvez
pas vous décider dès maintenant au vu des informations et de votre situation personnelle,
que vous êtes déjàen contact avec un organisme pour une formation ou un
suivi ; que la formation est incompatible avec votre temps partiel, etc. Si vous demandez
un rendez-vous individuel, indiquez-le également. En un mot, exigez qu’on vous
informe très clairement et répondez avec prudence.
Si vous décidez d’accepter une de ces actions, sachez que :
- vous ne serez pas automatiquement choisi car il n’y a que 400 places pour 3500
convoqués. Mais votre intérêt pour une formation sera transmis àvotre ANPE...
- la rémunération évoquée (dont on ne vous précisera pas le montant) n’en est pas
une. Il s’agit d’une sorte de maigre indemnité qui se substituera àvotre revenu si
celui-ci est déjàfaible ou complétera un peu votre RMI ou ASS, ou sera nul si vous
avez encore des indemnités ASSEDIC conséquentes.
- l’Action " Découverte des Métiers " permettra àl’ANPE de vous orienter vers l’industrie,
le bâtiment ou le service àla personne (entre autres pour faire des ménages, les
courses, etc). Vous ne pourrez alors plus refuser un poste répondant " aux besoins du
bassin de l’emploi " et compatible avec cette formation, au risque d’être sanctionné en
application du décret Villepin : -20%¨de votre allocation au 1er refus, puis -50%, puis
radiation.
Dans tous les cas, SACHEZ QUE SI VOUS NE REMETTEZ PAS CETTE FICHE vous vous
exposez àdes sanctions, au même titre que ceux et celles qui ne se seront pas présenté-
e-s.

Chômeurs mais pas inactifs pour autant

Bien sà»r, être au chômage entraîne une
baisse des revenus, pour ceux qui travaillaient
auparavant (même si on était
rarement bien payé !). Bien sà»r, le RMI
ou l’ASS ne suffisent pas pour vivre.
Mais il y a une chose qui n’a pas de prix,
et que l’on perd en travaillant : notre
temps libre.
C’est vrai, l’Assedic, l’ANPE ou les référents
sociaux pour les Rmistes cherchent
ànous gâcher ce temps libre en
multipliant les convocations, en cherchant
ànous imposer un accompagnement
individualisé, ànous obliger d’
accepter des boulots précaires, souspayés
et souvent pénibles dans les secteurs
où les patrons ont besoin de main
d’oeuvre... Le CI-RMA (CDD au SMIC
horaire qui permet au patron de toucher
le RMI de son salarié et de ne pas
payer de charges), le contrat d’avenir
(35h payées 26, la différence étant soidisant
de la "formation" gratuite) sont
des outils supplémentaires pour ceux
qui sont chargés de nous fliquer. Tout
comme les nouvelles mesures de sanctions
des chômeurs.
Les patrons et leurs auxiliaires administratifs
voudraient que tout notre temps
soit occupé àfaire la queue àl’ANPE, à
photocopier des CV et coller des timbres,
àpasser des coups de fil pour un
entretien ? Nous sommes nombreux à
n’en avoir ni l’envie ni, de toutes façons,
les moyens. Face àcela, nous ne sommes
pas démunis. Puisque nous avons
le temps, prenons-le, pour nous organiser
collectivement et améliorer notre
ordinaire.
Se faire recevoir par le directeur de son
ANPE et l’obliger àannuler une radiation
abusive, parce qu’on a débarqué à
quinze dans l’agence, c’est mieux que
se faire culpabiliser lors d’une convocation
où on est seul, non ? Alors, mettons
ànotre tour la pression ànos travailleurs
sociaux, organisons-nous entre
précaires, pour obtenir un logement,
avoir des aides financières, rétablir l’électricité,
pouvoir se déplacer...
Même pour ceux qui ont un projet professionnel,
il n’y a rien. On peut attendre
deux mois la réponse de l’ANPE pour
une formation de 3 jours, ou se faire
radier du RMI parce qu’on a commencé
une équivalence du bac sans avoir
demandé la permission àson référent !
Alors si vous ne voulez plus vous laisser
marcher sur les pieds et perdre votre
temps dans des recherches d’emploi
qui au mieux aboutiront àun boulot
de merde mal payé (200 000 emplois
non pourvus pour 4 millions de chômeurs !),
mettez-vous en lutte. Nous
avons plein d’infos et de pratiques à
échanger. Nous avons tout àgagner !

L’avenir appartient àceux qui s’entraident

Un chômeur tout seul : pas facile de se
faire entendre par l’ANPE, l’Assedic ou son
référent RMI, de se renseigner sur ses
droits et ses devoirs... et les leurs !
Un chômeur accompagné : ça va déjàun
tout petit peu mieux. Parce qu’on a le droit
d’être accompagné par la personne de son
choix dans n’importe quelle administration,
il ne faut pas hésiter àen abuser. Cela
permet d’avoir un témoin, d’être soutenu
et de diminuer légèrement la pression.
Des chômeurs organisés ? Làon commence
às’amuser... et àêtre efficaces. Qu’il s’agisse
d’un cas individuel ou de revendications
collectives, rien de tel que d’être
nombreux. Démonstration.
A Lyon comme àNantes, fleurissent au
printemps 2005 les occupations de
Commissions locales d’insertion(CLI),qui
décident,sousl’autoritédu Président du
ConseilGénéral, de la validation des
contrats d’insertion et de la suspension des
Rmistes récalcitrants.
A Paris, plusieurs associations d’insertion
qui gèrent les dossiers de Rmistes sont
occupées, notamment pour permettre la
signature de contrats d’insertion sur le
volet social (logement, activité non salariée,
...).
L’intervention collective pour régler un litige
Assedic (trop perçu abusif, dossier bloqué...)
ou ANPE (notamment les radiations
pour des motifs fantaisistes) est un classique
des collectifs de précaires. Ça ne
règle pas forcément tout, mais cela permet
d’inverser le rapport de mise en accusation.
Et quelques fois d’avoir des infos sur
les mesures en cours.
Comme il vaut mieux prévenir que guérir,
ces interventions collectives sont l’occasion
d’informer les autres chômeurs, de discuter.
Les convocations, notamment de
bénéficiaires de l’ASS, pour des stages de
remotivation et de recherche d’emploi à
l’AFPA, ont été l’occasion pour les collectifs
AC ! de Nantes de mettre en garde les chômeurs
sur leurs droits et leurs obligations.
D’autres actions permettent d’interpeller
des responsables sur leur politique en
général : AC ! Bordeaux CUB a fait une tournée
aux mois de septembre-octobre :
ANPE, Chambre de Commerce et
d’Industrie, DRTEF ont dà» s’expliquer sur
les convocations et radiations, la réalité des
offres d’emplois, ou de créations d’entreprises
proposées... Le 29 septembre, le
Directeur Général de l’ANPE, venu donner
une conférence de presse-petit déjeuner,
répond par le silence aux questions très
précises des chômeurs, précaires et intermittents
sur les nouvelles mesures de
contrôle... Il saura ainsi qu’il peut se trouver
’’contrôlé’’ n’importe quand !

Pour le plein emploi de nos vies

Depuis la création de l’UNEDIC la société
française a énormément évolué notamment
avec l’émergence de la précarité, de
l’intermittence du travail et donc du revenu.
En effet l’emploi précaire, c’est les congés
non payés (chômage), la RTT contrainte et
non rémunérée (temps partiels), la retraite
sans pension et avant l’heure (interdiction
du Rmi aux moins de 25 ans).
La précarité de l’emploi, c’est le travail sous
contrôle. Chômeurs et fainéants (ceux qui
refusent la production débile, les salaires
de misère et l’exploitation) sont " accompagnés" dans le cortège des contrats pourris
- contrats d’avenir, contrats d’insertion,
RMA, contrats tremplin - Derrière les paillettes
du " suivi personnalisé " : contrôle, revenus
en chute libre, subventions aux
employeurs ; emploi forcé et salaires en
miettes.
Et pour les salariés " classiques " (non précaires ?), c’est la peur entretenue du licenciement,
ou du non-renouvellement de
poste.
L’emploi précaire ne garantit plus un salaire
continu. Le SMIC n’est plus mensuel, il
est " horaire ". La flexibilité, c’est le bénévolat
du temps d’astreinte, de chômage. Et
c’est la rémunération calculée selon le
planning de l’employeur.
L’emploi précaire explose. La France compte
probablement près de 10 millions de
précaires. Plus d’un million et demi de travailleurs
pauvres (20% sont " pourtant " en
CDI) vivent avec moins de 557 euros par
mois. Près de 3 SDF sur 10 ont un emploi.
A l’échelle européenne, les précaires constituent
17% de la population.
Il est donc évident qu’un système comme
l’Unedic reposant sur les cotisations des
salariés (de plus en plus élevées) et patronales
(de plus en plus faibles) ne peut plus
aujourd’hui satisfaire les besoins comme
auparavant. De plus c’est un système qui
ne prend pas en compte le fait que le chômage
est devenu un moment du travail.
Face àce constat, nos gouvernements,
certaines élites, le MEDEF, cherchent, en le
stigmatisant, àrendre responsable de sa
situation tout chômeur. Pour eux, le chômeur
(au sens large) serait donc par "définition"
un fainéant, un parasite, un assisté
qui profiterait de la société. D’un autre côté
les mêmes insistent sur le fait que les salariés
français ne travailleraient pas assez, ni
assez longtemps. On monte artificiellement
deux "catégories" (chômeurs/salariés) les
unes contre les autres, ce qui fait dire, àtravers
les sondages que les chômeurs, ces
fainéants, sont trop indemnisés et ne font
pas assez d’efforts pour retrouver du boulot.
La solution àtous nos maux serait donc de
travailler plus (pour ceux qui ont déjàun
boulot), de travailler tout court pour les
autres. Sauf qu’il n’y a pas assez de travail
pour tout le monde et que si certains postes
ne trouvent pas preneur c’est qu’ils sont
mal payés et que les conditions de travail y
sont difficiles (bâtiment, restauration essentiellement).
Malgré ça le MEDEF et nos
gouvernants ainsi que quelques syndicats,
nous rabâchent les oreilles avec la relance
de la croissance comme solution : croissance,
augmentation du pouvoir d’achat,
et plein emploi sont la nouvelle trinité du
XXIème siècle. Bien sà»r, il est légitime de
vouloir augmenter les bas salaires mais a-ton
besoin pour cela de produire des choses
inutiles, polluantes, nuisibles. Ne serait-il
pas plus opportun de répartir les richesses
existantes plutôt que de produire toujours
davantage, pour le profit de quelques uns
et le malheur des autres.
Mais ça veut dire quoi la croissance ? La
production de biens (n’importe lesquels du
moment qu’on travaille et qu’on produit)
de manière indéfinie, une pollution toujours
en augmentation, une aliénation
continue dans des activités salariées qui ne
répondent pas ànos réels besoins ?
Au plein emploi du travail salarié nous préférons
le plein emploi de nos vies et la
redistribution des richesses.
Dans notre société nous avons les moyens
de tous vivre correctement.
Alors oui le système actuel d’indemnisation
est dépassé (il ne couvre même pas un
chômeurs sur deux), il éjecte de plus en
plus de personnes àla charge de l’Etat
(ASS) ou des Conseils généraux (RMI), il est
cogéré par des gens qui ne vivent pas nos
situations.
Ce que nous désirons c’est que tout le
monde ait les moyens de vivre. Une réelle
indemnisation juste ce serait un revenu
garanti inconditionnel pour tous qui prenne
en compte les différentes situations
(primo demandeurs d’emploi, intermittence
du travail, handicap, contrats aidés,...)


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