Crise financière de l’UNÉDIC

analyse et explications
jeudi 8 avril 2004
par  le réseau d’AC !

Document de travail élaboré par Marc du collectif Paris Nord Ouest (décembre 2002).

Crise financière : échec des partenaires du PARE

La situation financière de l’UNÉDIC n’a rien d’une catastrophe naturelle : elle est largement le résultat des choix des signataires du Pare de baisser le taux des cotisations chômage. Elle révèle un des aspects - important - de la crise politique du système d’assurance chômage en France, de son mode de gestion.
Elle ne saurait masquer la crise d’efficacité sociale de l’UNÉDIC dans l’accomplissement de la mission que le Code du Travail lui confie : distribuer àtoutes et tous un revenu de remplacement satisfaisant.

Retour sur 2000 :

« Où sont passés les 18 milliards d’excédents de l’an 2000 ?  »

Après deux années de déficit, l’UNÉDIC redevient excédentaire en 2000.
Pour aider àla conclusion de la première version de la convention du Pare, les experts de l’UNÉDIC, confiants dans le recul du chômage, évaluaient à18 milliards d’euros un excédent budgétaire pour les années 2001-2003, avant tout changement de règles d’indemnisation.
Le financement des dépenses du Pare a été négocié sur la base de cette estimation euphorique et se décomposaient en trois postes (en milliards d’euros) :

  • Effet PARE sur l’emploi : 3,4 ;
  • Excédents cumulés jusqu’au 31.12.99 : 3.5 ;
  • Excédents prévisionnels 2000-2003 : 11.3

Le premier poste correspondait au gain qu’allaient représenter la baisse du nombre de chômeurs par une sortie plus rapide vers l’emploi, dont ils étaient sà»rs
Autre financement, et même rigueur : les excédents prévisionnels correspondant à60 % du total.
C’est par cette projection d’excédents de 18 milliards - largement théorique - que les partenaires du Pare finançaient leur décisions : la baisse des taux de cotisations salariales et patronales (10.8 milliards) ; seulement 4.3 milliards pour l’amélioration de l’indemnisation (arrêt de la dégressivité et allongement de la période de référence de la filière 1, pour une meilleur prise en compte des précaires).
La convention finale intégrera aussi une « clarification des relations financières entre l’Etat et le régime d’assurance chômage  » contre un versement exceptionnel àl’État de 2,44 milliards de d’euros [1] !
Les versions définitives de la convention et de la répartition [2] de l’excédent seront bien conformes aux objectifs du MÉDEF : priorité àla baisse des cotisations chômages ; maintien de mauvaises conditions d’indemnisation ; mise en place d’un culpabilisant dispositif dit de retour àl’emploi, le PARE [3].

La crise financière de 2003 :

  • « Le résultat financier de l’UNÉDIC  » [4]

Ce tableau rappelle les résultats des dernières années et les prévisions pour 2002. Inquiétant ? Contrairement aux versions de mars et juillet de cette évaluation, aucune hypothèse n’était proposée pour 2003.

L’inadaptation de la convention dite de 2001 - qui débuta par une baisse de cotisation - est flagrante. Les gestionnaires n’avaient pas pris en compte le risque chômage !

  • « L’équilibre de l’assurance chômage  »

Précisions :

    • Sont nommés techniques les recettes et dépenses ayant directement àvoir avec l’assurance chômage...
    • Les autres dépenses (aides aux employeurs, frais de gestions) et recettes ont pour point commun d’être extérieures aux « missions de base  » de l’UNÉDIC.

Pour la première fois depuis longtemps, les produits (les cotisations) ne couvrent plus les dépenses (les allocations).

  • « Le coà»t de la politique de baisse des cotisations  »
    • Les dépenses :
      Les dépenses techniques sont à97 % des allocations (ARE, AUD, ACA) [5].
      • Les dépenses non techniques financent les contrats de qualification et autres aides dégressives àl’employeur : 11 et 22 millions d’euros ;
      • Les frais de gestion, formations et bilan du Pare apparaissent pour 525 millions d’euros ;
      • L’ARPE [6] comptera encore pour 1 010 millions d’euros en 2002.
    • Recettes : 2 années àbaisses forcées
      A plus de 99 %, les recettes techniques sont constituées des cotisations et constituent l’essentiel (97%) des recettes de l’assurance chômage.
    • Le taux des cotisations constitue la principale marge de manÅ“uvre financière de l’assurance chômage : en poussant àleur baisse, le libéral MÉDEF savait planter le système ;
    • Le taux des cotisations passent le 1er janvier 2001 de 6,18 à5,8 % (- 0,38 point correspondant àun manque àgagner de 6,6 %) puis le 1er janvier 2002 [7] à5,6 (- 3,6 %) ;
    • Le coà»t pour l’UNÉDIC de ces deux baisses des cotisations est de plus [8] de 3 milliards d’euros sur deux ans soit 80 % du déficit ;
    • Victoire de la CGC, la convention dite du Pare a supprimé la sur-contribution sur les rémunérations élevées qui représentaient pourtant 234 millions d’euros en 2000 ;
    • Avec l’arrêt de l’AFR disparaît peu àpeu la faible contribution de l’Etat - 35 contre 348 millions en 2000 - àla formation des chômeurs indemnisés ;
    • L’UNÉDIC envisage 224 millions d’euros de revenus financiers pour 2002.
Equilibre financier de la convention de juillet (en milliards de F)- source : UNÉDIC

Ils voudraient nous jouer le coup de la surprise : Du chômage ? Incroyable... !
Ces personnes et organisations ayant en charge la gestion de l’UNÉDIC, qui se présentent comme de super - patrons et des super - responsables, n’ont pas anticipé le retournement de conjoncture. Pire, les baisses de cotisations ont provoqué une crise majeur du dispositif assurance chômage.
Que cela constitue principalement une marque d’incompétence ou une étape dans l’avancé de leur projet de précarisation, dans tous les cas, ils sont coupables et le dispositif permettant de tel dérapage ne peut avoir d’avenir.
C’est l’occasion d’une remise àplat, et non en cause, du dispositif du revenu de remplacement.


[1Voir la convention assurance chômage du 1er janvier 2001 mais aussi le texte de la loi DDOSEC du 16 juillet 2002.

[2Pour une présentation succincte et disponible sur le web : « La réforme de l’indemnisation du chômage en France  », Jacques Freyssinet IRES Février 2002 ; Pour une analyse plus détaillée voir « La convention du 1er juillet en chiffres, des prévisions bien incertaines  », Christine Daniel DROIT SOCIAL avril 2001.

[3Plan d’Aide au Retour àl’Emploi

[4L’équilibre financier de l’assurance chômage UNÉDIC 6 novembre 2002 - Voir aussi : UNÉDIC 3 juillet 2002 - et UNÉDIC 4 mars 2002

[5ARE Allocation Retour àl’Emploi - AUD Allocation Unique Dégressive - ACA Allocation Chômeur Agé.

[6Système de préretraite décidé par les gestionnaires de l’UNÉDIC, dont on a pu contester le financement par l’assurance chômage.

[7Une troisième baisse à5.4 au 1er juillet 2002 était prévue par la convention mais les gestionnaires ont finalement du àla fois la reporter et revenir sur la précédente. C’est àcette occasion, le 19 juin 2000, que les partenaires du MÉDEF décidèrent également de doubler la contribution des professions du spectacle, rompant ainsi le principe d’égalité, par la création d’une cotisation alimentant un fond spécifique.

[8Estimation réalisée àpartir des montants de contributions indiqués par l’UNÉDIC en novembre 2002, soit 20 720 et 20 845 millions d’euros pour 2001 et 2002. Respectivement le manque àgagner est de -1 356,3 et de - 1 737,9 millions d’euro. Remarque : l’impact de la seconde baisse, qui a sévit de janvier àjuin 2002 inclue, est calculé sur la base d’une demi-année. Celui du doublement des cotisations des intermittents n’est pas calculé.